Les thinks tanks

Publié le par Xavier Cheneseau

Le rôle des incubateurs d’idées dans le paysage politique Français

 

 

Faire de la politique autrement : l’idée n’est pas neuve. Etre en prise sur les réalités du terrain et surtout faire jaillir de nouvelles approches des problèmes de la société française, élaborer des scénario, donner forme à de nouvelles idées capables de séduire les électeurs en attente : telle est la finalité de ce que l’on baptise du nom générique de think tanks : les boites à idées.

 

Concept « made in USA » né au début du XXème siècle, 1 500 think tanks sont aujourd’hui  recensés aux USA.. Le plus connu et le plus  important  est la Rand Corporation né à la fin des années 40. Ce groupe est spécialisé  en  stratégie militaire.  

 

Le phénomène a, par la suite, gagné le monde de l’entreprise. Les réservoirs de pensées tendent à développer une influence idéologique.

 

Longtemps, la France est resté à l’écart de ce bouillonnement d’idées que l’Allemagne, l’Angleterre, l’Italie, l’Espagne et les Etats-Unis connaissaient depuis plusieurs décennies. Cela s’explique en partie par notre conception de l’Etat, héritage à la fois de la monarchie, du jacobinisme et du catholicisme, qui nous permettait d’estimer qu’il était le seul à pouvoir apporter des réponses concrètes capables de répondre aux attentes politiques des électeurs. Les promoteurs sont généralement des institutions privées, chefs d’entreprise, experts, leaders d’opinion, hommes politiques, syndicalistes,acteurs associatifs, magistrats ,historiens, chercheurs, scientifiques ou encore des économistes. Les différents sujets étudiés dans les thinks thank sont aussi variés que la réforme de l’Etat, la réforme du système de retraite, la réforme de la fiscalité, le « Repérages des changements possibles », l’éthique dans le monde de l’entreprise, la réforme de la sphère publique, économique et politique, L’Europe économique, le rôle de la Police nationale, la transparence financière, les identités d’entreprises européennes, la juste place de l’homme dans l’économie de marché, les nouvelles technologies et e-démocratie, ou encore le gouvernement d’ entreprise

 

Les deux premières fondations politiques françaises ont vu le jour au début des  années 90. La Fondation Robert Schuman et la Fondation Jean Jaurès, nées au lendemain de la chute du mur de Berlin c’étaient donné comme mission le développement des idéaux démocratique en Europe de l’est. Crée en février 1992 par Pierre Mauroy, la fondation Jean Jaurès (www.jean-jaures.org), elle revendique une réelle indépendance organique et financière par rapport au PS. « Notre budget de fonctionnemant dépend pour 97% de subventions d’Etat ou de collectivités locales », affirme Gilles Finchelstein, son délégué général. Cette fondation développe ses activités autour de trois pôles : la coopération politique internationale, la collecte et la sauvegarde des archives socialistes, ainsi que la formation d’élus et l’élaboration et la diffusion de notes d’actualité. « Nos travaux influences bien au-delà de la gauche, pour preuve la prise en compte par le gouvernement de la fracture numérique et les dispositions qu’il a prie émanent directement de nos travaux ! », affirme un sourire en coin, Gilles Finchelstein.  

 

En 2004,  la Fondation pour l’innovation politique (www.fondapol.org), mise sur pied par Jérôme Monod voit le jour. En 2003, dans le magazine L’Expansion, Pierre-François Mourier, un des initiateurs de la fondation proche de l’UMP, expliquait la démarche de la Fip : « Les universitaires travaillent et cherchent, mais ils ont tendance à ne parler qu’à leur pairs. Les entrepreneurs entreprennent et réfléchissent, mais ils créent des clubs ad hoc, souvent fermés. Les politiques aimeraient bien réfléchir plus, mais, pressés par l’urgence, ils s’arrêtent au pied de la colline. Bref, chacun cherche son chat sans jamais le trouver. C’est pourtant par le frottement des cultures, des points de vue, que peuvent se dégager des pistes nouvelles. Expérimenter ce rôle de carrefour, telle est la légitimité des fondations politiques. »

 

Les incubateurs d’idées permettent de répondre à l’incapacité des partis à appréhender le long terme en trouvant des solutions audacieuses afin de répondre aux attentes de la société française. Si en 1968 la France s’ennuyée, aujourd’hui force est de constater que le débat politique semble s’essouffler. L’appel d’aire nécessaire semble aujourd’hui venir de ses laboratoires d’idées qui irriguent de leurs travaux les sphères dirigeantes, tant politiques qu’économiques. Depuis peu les partis se comportent comme des structures captives à l’égard du monde des idées. Répondant au besoin de refondation idéologiques ces fondations publient des études, des ouvrages de références et sont très présente sur internet. Soucieux de faire de l’UMP une force de proposition, Nicolas Sarkozy a suspendu la subvention de 800 000 euros  destinés à la Fip. A gauche, la situation est plus claire : la Fondation Jean Jaurès, même si elle revendique son indépendance, est étroitement liée a la direction nationale du PS. On retrouve notamment Dominique Strauss-Kahn à la tête du comité d’orientation de la Fondation Jaurès. La Fondation Schuman (www.robert-schuman.org), autrefois liée à l’UDF, c’est affranchi de la tutelle centriste, elle c’est imposée comme au niveau international comme un interlocuteur privilégié entre la commission de Bruxelles, le Parlement européen et les institutionnels Français notamment.L’ancien Premier ministre Raymond Barre et Jean-François-Poncelet font partie de son Conseil d’administration.

 

La dernière née des  fondations est la Fondation Gabriel Péri (www.gabrielperi.fr), née sous l’impulsion de Robert Hue qui en assure la présidence, elle a pour volonté de diffuser un « travail rigoureux de compréhension des mutations de notre époque et des mobilisations citoyennes pour la progrès humain qu’elles peuvent susciter. »

 

L’Institut Montaigne fait référence dans le monde politique et économique. Fondée il y a cinq ans par Claude Bébéar, elle  élabore et diffuse des idées pragmatiques, et des propositions concrètes et opérationnels utiles aux décideurs. Pour éclairer les politiques publiques et les rendre meilleures, elle travaille sur des scénario concrets allant même jusqu’à prendre à témoin l’opinion publique. Plusieurs de ses propositions sont prises en compte par des décideurs de droite et de gauche qui ont compris que le renouvellement des idées passé par l’affranchissement des schémas anciens, et qu’il était nécessaire de prendre en compte les aspirations de la société civile.

 

 

Les clubs de réflexion

 

 

Ils ont le statut associatif et ont pris on part active dans les derniers scrutins électoraux. Souvent perçu comme des « écuries présidentielles », ils agissent comme des outils d’influence et de cohésion interne à leur  famille politique. Les lignes de fractures politiques traversant aujourd’hui droite et gauche, ils permettent aux militants de se retrouver selon leurs sensibilités.

 

A gauche, les nostalgiques de la gauche plurielle se retrouvent au sein de la Fondation Copernic (www.fondation-copernic.org), présidée par le Conseiller d’Etat Yves Salesse, elle a prie une part importante dans l’élaboration de l’argumentaire du Non de gauche. C’est en effet Copernic  qui a donnée naissance à L’appel des 200, relayé ensuite par environ 500 groupes locaux ; Au sein de la Fondation Copernic se côtoient tout le panel de la gauche allant du rose au rouge en passant par le vert et « le monde associatif »: PS, PC, FSU, DAL,CGT, LCR , Verts, Syndicat de la magistrature… qui travaillent ensemble par commissions sur des thèmes variés : « Par l’intermédiaire de ses groupes de travail (rassemblant des universitaires et des acteurs du mouvement social), dont les conclusions sont éditées sous forme de courtes notes argumentées, Copernic prend part au débat public et tente d’apporter un autre éclairage aux questions sociales et économiques… collège unique, la défense européenne, les politiques urbaines, l’homoparentalité… autant de thèmes et de problèmes où le besoin de propositions alternatives se fait cruellement sentir pour répondre aux contre-réformes libérales-conservatrices… Le libéralisme n'est pas la liberté mais son contraire, l'enfermement dans les rets des plus forts, l'acquiescement donné à ce que se reproduisent à s'aggravent les inégalités : que les pauvres s'appauvrissent et que les riches s'enrichissent. Nous ne ferons pas reculer les idées libérales en nous réfugiant derrière les illusoires remparts du nationalisme et du protectionnisme. 
Nous sommes convaincus qu'il faut prendre l'offensive, rompre avec les politiques anciennes, définir et promouvoir des réformes audacieuses. C'est à cette tâche que la Fondation Copernic veut contribuer en montrant à chaque étape et sur chaque problème que d'autres politiques que celles qu'inspire le libéralisme sont possibles.
 »

 

Toujours à gauche, mais du côté socialiste « officiel », Dominique  Strauss-Kahn et Michel Rocard ont cofondés A gauche en Europe, qui c’est distingué lors de la campagne référendaire en élaborant et en diffusant largement un CD dans lequel Dominique Strauss-Kahn c’est mis en scène pour défendre le oui socialiste.

 

A droite, le foisonnement qui existait dans les années 80 : Club de l’horloge, Club 89, Perspectives et réalité… structures aujourd’hui plus confidentielles, a laissé place à de nouvelles associations comme les Notre république, France république, Fondation Concorde…

 

A la Fondation Concorde (www.fondationconcorde.com), l’empreinte de Jérôme Monod, Conseiller du Président de la république reste très forte, puisque après avoir participé à sa création, elle est parrainée par lui. Soucieux de préserver son indépendance, Concorde est pourtant liée à la majorité présidentielle. L'économiste Michel Rousseau, qui en assure la présidence, affirme sa volonté de pratiquer la sur proposition à l’égard des dirigeants de droite. Concorde travaille au travers de 12 commissions. Son influence s’opère en alimentant le débat d’idées, pour ce faire elle recherche l’adéquation entre ses travaux et le débat politique. Son Président n’hésite pas a affirmer : « Nous sommes attachés  au succès de notre pays, et nous proposons des solutions sans complexe. » La Fondation Concorde, de part les liens privilégiés qu’elle a su lier avec le monde industriel, les entrepreneurs et nombre de dirigeants de la majorité a été l’inspiratrice de la révision de la taxe professionnelle, de la réforme de l’administration et de celle de l’enseignement supérieur. C’est elle qui a imposée le principe des pôles de compétence et de compétitivité. La Fondation Concorde est l’unique laboratoire d’idées de droite à avoir légitimé ses idées par l’action.

 

Fondés par d’anciens élèves de grandes écoles les Cercles de Brienne réunissent au travers de petits déjeunés des militaires, des décideurs politiques et des industriels. L’ambition de son Président Stéphane Morin est d’en faire un véritable think tank à l’anglo-saxonne : « Lors de nos rencontres, nous abordons des questions liées aux problèmes de défense. Nous agissons de façons discrètes et mettons en contacts différentes personnes dont les compétences sont complémentaires dans le domaine de la sécurité intérieure et extérieure. »Du côté des libéraux, Alain Madelin a lancé sur les restes d’Idées action, les Cercles libéraux (www.cerclesliberaux.com), qui pour Guillaume Jublot, un proche de l’ancien ministre sont « Un lieu de rencontres non partisan et de débats, cependant mouvement associé de l’UMP. Au cœur de la société et ouvert sur le monde, notre vocation est de concevoir et exprimer des propositions modernes et libérales marquées par l'audace réformatrice. Les Cercles libéraux ont vocation à être un pont entre la société civile, les décideurs politiques et les leaders d'opinion. »

 

 

Gageons que ces laboratoires d’idées, joueront un rôle déterminant dans le débat politique des prochaines années, et que certaines d’entre elles sauront alimenter le débat de la prochaine présidentielle.

 

 

Xavier Cheneseau

 

 

Eclaté N°1

 

 

Le cadre légal d’une fondation politique

 

 

Officiellement, les fondations politiques relèvent de la loi de 1987 qui stipule que « l’acte par lequel une ou plusieurs personnes physiques ou morales décident de l’affectation irrévocable de biens, droits ou ressources à la réalisation d’une oeuvre d’intérêt général et à but non lucratif. » Elles peuvent recevoir des fonds publics et privés et sont soumises aux contrôles du Conseil d’Etat, chose que ne connaissent les autres types d’associations. Elles sont aussi régies par la loi de 2003 sur le mécénat, les dons sont donc déductibles à 60% pour les particuliers et à 50% pour les entreprises. A cela, il faut ajouter qu’un commissaire du gouvernement siège au conseil d’administration de chaque fondation.

 

 

 

Eclaté 2

 

Cercles  de réflexion

 

 

Institut de l’entreprise

 

 

Ces nombreuses commissions sont composées d’experts et de chefs d’entreprises, elle promeut l’esprit d’entreprise et analyse les politiques publiques. Elle dispense aussi des formations afin de sensibiliser des élus, fonctionnaires, magistrats… aux réalités de l’entreprise. Parmi ses membres on note la présence de Michel Bon, Henri Lachmann ou encore Michel Pébereau.

 

www.institut-entreprise.fr

 

 

L’institut Montaigne

 

 

Créée à l’initiative de Claude Bébéar, elle élabore des propositions concrètes qui sont ensuite « vendue » auprès des décideurs économiques et politiques. Elle produit nombre de textes ayant trait à la stratégie économique française et à la modernisation des sphères dirigeantes françaises.

 

www.institutmontaigne.org

 

 

En temps réel

 

 

C’est un lieu d’action et de réflexion né sur les décombres de la Fondation Saint-Simon. Elle a participé de façon significative à l’argumentaire du oui socialiste. Parmi ses dirigeants, on note la présence de Zaki Laïdi, Denis Olivienne ou encore de la journaliste Laure Adler.

 

www.entempsreel.org

 

 

Confrontations Europe

 

 

Elle a été fondée par Michel Rocard, Jean Peyrelevade ou encore Philippe Herzog. Elle fait travailler de concert des syndicalistes, des élus et des intellectuels. Elle veut promouvoir le « dialogue européen combinant le social, l’économique et le culturel ». Elle a su s’imposer comme un interlocuteur privilégié des institutions européennes.

 

www.confrontations.org

 

 

Croissance plus

 

 

Créée en 1997, l'association fédère les dirigeants des entreprises membres. Pour adhérer, la candidate doit avoir vu son chiffre d'affaires, son effectif ou sa capitalisation boursière doubler au cours des cinq dernières années.

 

 

www.croissanceplus.com

 

Publié dans xavier.cheneseau

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